Abstract
(French)
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Dans bien des domaines, l'urgence est devenue un principe directeur de l'action sur les choses. Problèmes sociaux, catastrophes naturelles ou non, situations d'exception, décision politique, création culturelle ou même simple vie quotidienne, nous agissons et devons agir vite. Le temps s'accélère et exerce une tyrannie de la contrainte par une trop grande évidence du présent. Ce faisant, l'urgence dépositive l'action, individuelle ou collective, en la soumettant à l'évidence ou à l'impératif du faire. Agir en situation d'urgence ou agir sous l'emprise de l'urgence constitue à la fois un mode d'action et une forme de légitimation de ladite urgence. Parce que l'urgence, en appelant l'action, naturalise la situation, elle conduit à invalider la pertinence d'une action construite, d'une action projetée parce que problématisée. En ce sens, la référence à l'urgence ne modèle pas seulement notre capacité d'intervention sur les choses et sur autrui ; elle participe aussi à structurer notre représentation du monde et notre rapport au temps. Dès lors, nous devons bien concevoir que sa montée en puissance dans nos sociétés contemporaines ne saurait être réductible à une quelconque augmentation des situations objectivement urgentes, et qu'elle informe complètement notre rapport au temps et à l'action. En ce sens, elle constitue une des symbolisations majeures du vivre, de l'agir et du penser ensemble de cette fin de siècle. Le présent séminaire voulait repartir de cette évidence de l'urgence et la soumettre à question. Comment comprendre l'urgence? Sur quoi se fonde sa nécessité? Que qualifie-t-elle? Qu'y a-t-il, en somme, de commun à l'urgence dans des champs aussi divers que la politique, l'information, la culture, la médecine, le social, l'humanitaire et le simple quotidien? Ceci présuppose de prendre au sérieux aussi bien les critiques de l'urgence (sans tomber dans la dénonciation), que ses qualifications (sans tomber dans l'angélisme), et d'accepter de mettre en débat les rapports qu'elle entretient à l'efficacité, à la professionnalité, à la créativité, à la souffrance, à l'éthique, à l'action, au temps et même au statut du sujet. Ce séminaire interdisciplinaire, qui a réunit des universitaires et scientifiques belges, français et suisses, a été conjointement organisé par le Centre d'Etudes et de Recherches Internationales de la Fondation Nationale des Sciences Politiques de Paris et par la Chaire francophone du Département Travail social et Politiques sociales de l'Université de Fribourg. Il a été financièrement soutenu par la Direction G 12 de la Communauté européenne, l'Office fédéral de l'éducation et de la science suisse ainsi que le Conseil de l'Université de Fribourg.
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