En réponse aux conséquences économiques de la pandémie de COVID-19, la Confédération et les cantons ont pris différentes mesures. Celles-ci comprenaient les mesures pour les cas de rigueur. L’objectif était d’éviter des faillites et des suppressions d’emploi d’entreprises qui présentaient d’importants coûts fixes non couverts en raison des mesures prises par les autorités pour lutter contre la pandémie. Entrées en vigueur en décembre 2020, les mesures pour les cas de rigueur venaient compléter le dispositif d’aide, qui comprenait par exemple l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail et l’allocation pour perte de gain COVID-19. Les cantons étaient responsables de l’exécution. Il leur incombait de décider s’ils allaient prendre des mesures sur leur territoire et d’en déterminer la forme concrète. Au total, quelque 35 000 entreprises ont bénéficié des mesures pour les cas de rigueur, principalement sous la forme de contributions à fonds perdu, pour un montant d’environ 5,3 milliards de francs.
4Le Contrôle fédéral des finances (CDF) a évalué la conception et l’efficacité des mesures pour les cas de rigueur. L’évaluation s’appuie aussi sur une enquête réalisée auprès d’entreprises des secteurs les plus touchés. Plus de 2000 entreprises bénéficiaires et un peu plus de 700 entreprises qui n’ont pas perçu contribution au titre des mesures pour les cas de rigueur ont participé à cette enquête. En parallèle, deux bureaux privés ont évalué l’exécution des mesures, sur mandat du Secrétariat d’État à l’économie (SECO). 
L’évaluation conclut que les mesures pour les cas de rigueur ont constitué un soutien important pour les entreprises concernées et tire un bilan positif de leur efficacité, notamment sur la base des résultats de l’enquête. Le CDF note deux problèmes principaux concernant l’efficience. D’une part, une partie des contributions étaient trop élevées ou inutiles par rapport aux besoins. D’autre part, une certaine inégalité de traitement entre les secteurs, mais aussi entre les entreprises d’un même secteur. Le CDF a identifié plusieurs enseignements à tirer en prévision d’une future situation exceptionnelle qui indiquent, dans la conception des mesures, la cause de ces problèmes.
Bilan positif des effets du point de vue des entreprises concernées
D’une manière générale, les entreprises interrogées considèrent que les mesures pour les cas de rigueur ont eu un impact positif. La majorité d’entre elles estiment que les aides financières ont été importantes pour leur survie et se déclarent satisfaites de leur montant. En outre, les entreprises ayant bénéficié de contributions au titre des mesures pour les cas de rigueur étaient davantage affectées par la pandémie que celles qui n’en ont pas touché, ce qui indique que l’aide était bien ciblée.
Près de la moitié des aides ont été versées au secteur de la restauration et de l’hôtellerie. Une part importante a été octroyée à des entreprises du commerce de gros et de détail et à des prestataires du secteur des voyages.
Faiblesses conceptuelles au niveau des critères d’octroi et de calcul
L’approche conceptuelle visait à couvrir les coûts fixes non couverts. Au cas par cas, les mesures pour les cas de rigueur correspondaient plus ou moins bien au besoin effectif. Les aides ont compensé à des degrés divers les coûts fixes non couverts en fonction de la situation initiale et de la structure des coûts de chaque entreprise. Selon le CDF, un point faible des mesures réside dans l’importance accordée au chiffre d’affaires pour le calcul des aides. Cette réglementation a favorisé les entreprises affichant une forte baisse de leur chiffre d’affaires tout en ayant des coûts fixes faibles. Le véritable objectif des mesures, à savoir couvrir les coûts fixes non couverts, n’a été pris en compte que tardivement.
Le CDF porte un regard critique sur l’accès simplifié pour les entreprises qui ont été fermées sur ordre des autorités. Des aides ont ainsi été accordées à des entreprises qui n’étaient guère, voire pas du tout affectées, comme des entreprises qui, malgré la fermeture, ont pu réaliser un chiffre d’affaires comparable au niveau d’avant la pandémie, par exemple grâce à une forte progression d’autres canaux de vente (vente en ligne ou à l’emporter), ou encore des entreprises pour lesquelles la fermeture ne concernait qu’une partie de leur activité.
Divers enseignements pour l’avenir
Le CDF formule plusieurs enseignements à tirer, pour le cas où une aide financière similaire devait être accordée aux entreprises à l’avenir. Ces enseignements portent sur l’utilisation économe des fonds (coûts) ainsi que sur l’efficacité des mesures. Premièrement, les objectifs et la logique des effets de l’aide financière doivent être adaptés aux besoins et clairement formulés et communiqués. Deuxièmement, les critères d’octroi et, surtout, de calcul doivent correspondre plus précisément au but de l’aide. Les plafonds doivent également tenir compte du but. Il n’est pas nécessaire de couvrir l’intégralité des coûts non couverts, car le rapport coût/bénéfice stagne à partir d’un certain niveau de couverture. Troisièmement, les bases légales doivent prévoir explicitement la possibilité d’exiger la restitution des aides versées aux entreprises lorsque les contributions étaient trop élevées par rapport au but visé. C’est le cas, par exemple, lorsqu’une aide est conçue de manière imprécise en raison de l’urgence de la situation.
Les mesures pour les cas de rigueur étaient des mesures cantonales financées en partie par la Confédération sous certaines conditions. Les cantons disposaient ainsi d’une marge de manœuvre pour la mise en œuvre des mesures sur le terrain. Alors qu’il avait été convenu au départ que la Confédération assumerait 50 % du montant des aides, sa contribution s’est finalement montée à environ 84 % des contributions à fonds perdu. Si sa participation financière avait été maintenue à 50 %, la Confédération aurait économisé environ 1,75 milliard de francs. Le CDF estime qu’il n’est pas judicieux de combiner un fédéralisme d’exécution avec une participation financière proportionnellement élevée de la Confédération. Sur le plan conceptuel, il existe un risque que les cantons n’utilisent pas les fonds de manière efficiente si la majeure partie des charges est supportée par la Confédération. Par conséquent, il convient de définir pour l’avenir les principes de répartition des coûts entre la Confédération et les cantons.