La surveillance de la Confédération sur l’exécution, par les cantons, des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines n’est que partiellement opportune. Même si le soutien apporté par la Confédération en matière d’exécution est efficace, on constate des manquements en ce qui concerne le suivi de l’exécution dans les cantons. Par ailleurs, la Confédération n’intervient que rarement en cas de problème d’exécution. Au niveau fédéral, les interfaces entre la protection des eaux souterraines et l’agriculture respectivement l’aménagement du territoire sont globalement conçues de façon opportune.
En janvier 2020, les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont chargé le Contrôle parlementaire de l’administration (CPA) de procéder à une évaluation de la qualité de l’eau en Suisse, en se focalisant dès le début sur la protection des eaux souterraines.
En mai 2020, la sous-commission DFI/DETEC de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N), compétente en la matière, a précisé que l’évaluation devait porter sur la manière dont la Confédération assume la surveillance de l’exécution, par les cantons, des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines ainsi que sur les interfaces avec la politique agricole et l’aménagement du territoire au niveau fédéral.
Dans cette perspective, le CPA a analysé des documents, mené une quarantaine d’entretiens et réalisé une enquête auprès des services cantonaux de la protection de l’environnement. Il a également commandé un avis de droit afin de déterminer si les bases légales de la surveillance de la Confédération étaient opportunes. Sur la base de ces investigations, il est parvenu aux conclusions principales exposées ci-après.
Les instruments de surveillance dont dispose la Confédération en vertu de la loi sont clairs, mais leur portée limitée rend difficile une surveillance efficace (chap. 3)
Pour l’essentiel, le droit fédéral définit clairement les tâches que doivent accomplir les cantons s’agissant de l’exécution des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines (ch. 3.1) et les moyens dont dispose la Confédération pour surveiller l’exécution par les cantons (ch. 3.2). En ce qui concerne les mesures précitées, le droit fédéral ne précise toutefois pas dans quels délais les cantons doivent accomplir leurs tâches d’exécution. De même, les dispositions fédérales relatives aux rapports que les cantons doivent remettre à la Confédération sont rudimentaires. Enfin, la Confédération ne dispose d’aucune possibilité de sanctions praticable lorsqu’un canton n’accomplit pas ses tâches ou ne le fait pas correctement. Cela rend difficile une supervision efficace par la Confédération (ch. 3.3).
Le soutien en matière d’exécution est de bonne qualité, mais la mise à jour des aides à l’exécution prend du retard (chap. 4)
En ce qui concerne la surveillance des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines, l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) se concentre sur le soutien apporté aux autorités chargées de l’exécution. Il s’entretient régulièrement avec les services cantonaux de la protection des eaux. En cas de questions ou de souhaits relatifs à l’exécution, ces services, comme d’autres acteurs impliqués dans l’exécution, peuvent s’adresser à l’OFEV selon une procédure simple. Les renseignements fournis par l’OFEV sont de bonne qualité (ch. 4.2). Les acteurs concernés apprécient la qualité et l'orientation pratique des aides à l’exécution, pour l’élaboration desquelles l’OFEV collabore étroitement avec les cantons. Toutefois, l’OFEV a pris un retard considérable dans les compléments et mises à jour nécessaires de ces aides. (ch. 4.1).
Malgré des lacunes persistantes dans l’exécution, l’OFEV fait usage de ses possibilités de surveillance avec trop de réserve (chap. 4)
L’OFEV n’utilise que rarement les instruments de surveillance relativement limités que la loi lui confère s’agissant des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines. Même si, ces dernières années, il a amélioré le suivi de de l’exécution par les cantons, d’importants manquements subsistent, de sorte que le suivi n’est que partiellement opportun (ch. 4.3). L’OFEV fait un usage encore plus réservé des possibilités dont il dispose pour régler les problèmes d’exécution. Bien qu’il ait constaté depuis longtemps, et à plusieurs reprises, que de nombreux cantons connaissaient des problèmes majeurs en matière d’exécution, il n’est, jusqu’à présent, pratiquement jamais intervenu (ch. 4.4). Par conséquent, on ne peut assurer que l’objectif des mesures d’organisation du territoire pour la protection des eaux souterraines – à savoir garantir des eaux souterraines de qualité en quantité suffisante pour la consommation actuelle et future – puisse être atteint.
Au niveau fédéral, les interfaces respectives avec l’agriculture et l’aménagement du territoire sont globalement conçues de façon appropriée (chap. 5 et 6)
Les compétences aux interfaces entre les différents offices fédéraux concernés sont claires et opportunes. Pour l’essentiel, la collaboration entre les offices se déroule de manière factuelle et constructive, même si la loi leur confère des tâches différentes (ch. 5.1 et 6.1). En règle générale, les structures et les processus permettent à l’OFEV de prendre en considération de façon efficace les intérêts de la protection des eaux souterraines aux interfaces avec l’agriculture et l’aménagement du territoire (ch. 5.2 et 6.2). Toutefois, s’agissant de la politique en matière d’aménagement du territoire, on ne peut pas toujours garantir que l’OFEV soit impliqué suffisamment tôt lors de l’évaluation des plans sectoriels de la Confédération et que les aires de protection des eaux souterraines soient systématiquement délimitées dans les plans sectoriels (ch. 6.2).
Les succès du programme de protection des eaux ne sont pas garantis à long terme (ch. 5.4)
En règle générale, les projets du programme de protection des eaux menés aux interfaces entre la protection des eaux souterraines et l’agriculture contribuent à améliorer la qualité des eaux souterraines. Toutefois, le programme ne prévoit aucune incitation permettant d’assurer la qualité des eaux souterraines au-delà de la durée de vie des projets, alors qu’un tel mécanisme serait indispensable pour affirmer que le programme est opportun. En outre, l’utilisation relativement faible du programme restreint son efficacité (ch. 5.4).