La réglementation et la transparence du recours à des experts externes par l’administration fédérale se sont améliorées ces dernières années. Les analyses statistiques réalisées dans le cadre du controlling des achats sont adéquates dans l’ensemble ; néanmoins, certaines lacunes ont été mises au jour concernant les examens approfondis. Les mandats d’expertise ne sont pas répertoriés de manière uniforme et les rapports de contrôle ne sont pas suffisamment probants.
Se fondant sur une évaluation du Contrôle parlementaire de l’administration (CPA) de 2006 qui portait sur le recours de l’administration fédérale à des experts externes, la Commission de gestion du Conseil des États (CdG-E) avait constaté différentes lacunes dans la transparence ainsi que dans l’adjudication et la réglementation des mandats d’expertise donnés par l’administration fédérale et avait adressé une série de recommandations au Conseil fédéral. S’il est vrai que la CdG-E avait relevé plusieurs améliorations lors de ses contrôles de suivi, différentes questions restaient sans réponse. En octobre 2018, elle a donc chargé le CPA de vérifier, dans le cadre d’un contrôle de suivi, la mise en œuvre de ses recommandations sous la forme d’une évaluation succincte.
Lors de ses séances du 28 août 2019 et du 11 novembre 2019, la sous-commission DFJP/ChF de la CdG-E, compétente en la matière, a décidé de l’orientation du projet. Le CPA s’est alors penché sur la mise en œuvre de cinq des six recommandations qui avaient été formulées par la CdG-E et a procédé à des analyses statistiques sur la base de données contenues dans le système de gestion des contrats de l’administration fédérale. En voici les principaux résultats :
Pas de « fièvre de décembre » selon les analyses internes à l’administration,
ce diagnostic n’est pourtant pas généralisable
On qualifie de « fièvre de décembre » le phénomène consistant, pour l’administration fédérale, à forcer le lancement de mandats juste avant la clôture de l’exercice comptable afin d’épuiser les budgets. Pour cerner ce phénomène, l’administration a procédé à des analyses dans l’ensemble de l’administration fédérale, qui étaient généralement adéquates. Ces analyses ne portent toutefois que sur une année (2017) – elles n’ont pas été renouvelées les années suivantes. De plus, le nombre d’unités administratives ayant été l’objet d’études circonstanciées sur la base de certains critères est faible. Les résultats ne peuvent donc pas être extrapolés sans réserve, d’autant moins que les informations relatives aux examens approfondis des risques réalisés dans les unités administratives en question sont assez superficielles. Contrairement à ce qu’affirme l’administration, il ne peut donc pas être exclu d’une manière générale que le phénomène de « fièvre de décembre » existe malgré tout dans l’une ou l’autre unité administrative.
Analyses statistiques des « fournisseurs attitrés » appropriées,
mais déficiences dans les études approfondies et dans le rapport
Les analyses relatives au problème de l’adjudication répétée de mandats aux mêmes entreprises (« fournisseurs attitrés ») effectuées par l’administration dans le cadre du controlling des achats (CoA) sont en principe appropriées. Ces analyses statistiques portent toutefois essentiellement sur les gros risques. L’examen subséquent des anomalies constatées est du ressort des unités administratives concernées. Il est donc effectué de manière très variable et parfois insuffisante. Les rapports de contrôle relatifs aux mandats subséquents sont en outre peu probants.
Catégorisation peu claire des mandats d’expertise,
donc pratique pas uniforme et controlling restreint
Sur recommandation de la CdG-E, l’administration fédérale a introduit des sous-catégories plus détaillées dans le CoA en 2016. Le but était d’amener plus de précision dans l’enregistrement des mandats de services confiés à des prestataires extérieurs à l’administration fédérale. Cette mesure a permis de réduire considérablement le nombre, critiqué par la CdG-E, des acquisitions ne pouvant pas être classées dans une catégorie spécifique. Il reste cependant souvent difficile de faire clairement la distinction entre les différentes catégories d’acquisitions dans le cas des mandats de prestations en général et dans celui des mandats d’expertise en matière politique en particulier. En conséquence, les unités administratives n’enregistrent pas tous les mandats d’expertise selon la même logique. Les données qui s’y rapportent sont donc difficilement comparables, ce qui complique considérablement le controlling et entache sa pertinence.
Données relatives aux mandats de consultants politiques peu fiables :
évolution de ces mandats pas claire
Selon les rapports relatifs au controlling, l’administration n’a pas, jusqu’ici, entrepris d’analyser spécifiquement les mandats de conseil politique, en dépit du fait que le Conseil fédéral avait envisagé de telles analyses en réponse à la recommandation de la CdG-E. La faiblesse du nombre des mandats enregistrés dans la sous-catégorie Conseil dans le domaine politique indique que l’administration évite cette sous-catégorie dans une large mesure et que les chiffres disponibles ne sont donc pas fiables. Le CPA a par la suite considéré toutes les catégories d’achat pouvant inclure des mandats d’expertise en matière politique, pour finalement constater que, en procédant ainsi, certains mandats n’ayant pas grand-chose à voir avec le conseil politique pouvaient aussi être inclus, tels que des mandats de recherche. Les données disponibles ne permettent donc pas de déterminer de manière fiable si le nombre de mandats de conseil politique a diminué, comme l’avait demandé la CdG-E.
Les lacunes constatées font ressortir les faiblesses générales du Controlling
des achats
Les points faibles que les analyses du CPA ont révélés dans la catégorisation des mandats d’expertise font ressortir des faiblesses générales au sein de l’administration ; la première concerne l’uniformisation des instruments du CoA et la seconde, la répartition des compétences. Le secteur Controlling des achats, à l’Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL), réalise certes des analyses statistiques pertinentes dans l’ensemble en ayant recours aux instruments du CoA. Les résultats obtenus ne sont toutefois pris en compte que de manière limitée par les départements, bien que ces derniers soient responsables du CoA dans leur domaine. En leur qualité d’unités transversales, le secteur Controlling des achats de l’OFCL ou l’Administration fédérale des finances ne disposent pas des compétences nécessaires, ce qui fait obstacle à une uniformisation de même qu’à l’efficacité du CoA.