L’enrobé de type macro-rugueux (AC MR) est aujourd’hui largement utilisé et recommandé par les gestionnaires pour les couches de roulement des chaussées très sollicitées. Il est reconnu pour son potentiel d’absorption du bruit de roulement obtenu par sa texture semi-ouverte. Cette texture semi-ouverte est dictée par la teneur en vides pour laquelle la norme SN 640-431-1b-NA, adoptée en février 2008, recommande une valeur Marshall comprise entre 6 et 10% pour tous types d’AC MR. Ceci constitue une augmentation substantielle par rapport à la précédente version (SN 640-431-1a-NA) qui préconisait une teneur en vides Marshall entre 3 et 7% pour les enrobés AC MR de types N, S et H.
Les administrations souhaitent monter encore la teneur en vides pour augmenter les performances d’absorption du bruit de roulement. Cette augmentation n’est pas sans risque et peut réduire la durée de vie d’une telle couche de roulement. Une recherche est donc nécessaire afin d’évaluer le comportement mécanique et les caractéristiques de surface de ces enrobés macro-rugueux ainsi qu’analyser en détail les conséquences de leur teneur en vides importante. Par ailleurs, des coefficients d’équivalence ajustés sont également nécessaires, dans le but de compléter les données de valeur de portance des couches de la chaussée. Ceci dans le but d’optimiser les procédures de dimensionnement et renforcement.
Pour répondre aux objectifs, la recherche proposée comporte trois principaux modules qui sont présentés de manière synthétique dans la Figure 1 ci-dessous. La description complète et détaillée des différents modules étant faite par la suite.
(Figure 1 voir lien ci-bàs)
Figure 1: Vue générale du déroulement de l'étude
1) Etat des connaissances
La phase initiale du projet consiste à réaliser une analyse détaillée de l’état des connaissances. L’expérience avec les enrobés macro-rugueux sera également analysée au travers d’une enquête menée auprès des acteurs du domaine (administrations, producteurs, etc.).
2) Formulation et optimisation des performances en laboratoire
Définition des données de base
Cette phase du projet consiste à déterminer les éléments fixes pour la recherche ainsi que les éléments variables. Les paramètres suivants seront fixes pour toute la durée de la recherche :
· Type de liant : un seul liant (PmB) sera proposé pour les enrobés macro-rugueux.
· Type de granulat : granulat de bonne qualité, représentatif de la pétrographie suisse.
· Ajout de matériaux recyclés : aucun fraisat dans les AC MR.
Caractérisation des matériaux
Après la définition des données de base et le choix des différents matériaux, une première étape de caractérisation est nécessaire, dont les résultats seront par la suite utilisés pour la formulation. Les caractéristiques nécessaires dans un premier temps sont :
· Bitume : Pénétration, température A&B, viscosité, IP, Fraass
· Filler : Granulométrie, masse volumique, pourcentage de vides (Rigden)
· Sable : Granulométrie, masse volumique, angularité
· Pierres : Granulométrie, masse volumique, angularité
Formulation et optimisation des performances
La formulation et optimisation des performances se déroule en laboratoire et concerne la couche de surface en enrobé macro-rugueux. La formulation sera faite selon la méthode de formulation analytique développée par le Centre de Recherche Routière belge (C.R.R.) [1]. Cette méthode largement reconnue consiste à effectuer une formulation volumique analytique, les résultats étant traduits en masse dans une ultime étape. Le logiciel PradoWin est utilisé afin d’effectuer cette formulation. Dans cette méthode, les essais de laboratoire (Marshall) sont utilisés comme moyen de vérification des valeurs obtenues par la formulation volumique.
Le recours à une méthode analytique de formulation présente notamment pour avantage la possibilité de faire l’investigation de différentes formulations et analyses paramétriques en utilisant le module de prévision des performances.
La formulation effectuée sera également validée selon l’approche Marshall afin de s’assurer de la concordance avec les exigences suisses.
Lors de la formulation, un accent particulier sera mis sur l’incidence de la teneur en vides. La région de 7 à 15% de vides sera notamment analysée. Une analyse spécifique du module de richesse ainsi que son incidence sur la teneur en vides et les performances de l’enrobé sera également réalisée. Pour l’analyse des performances, les éléments suivants
seront notamment évalués sur enrobé, le choix final étant fait en accord avec la commission de suivi.
(TABLEAU voir lien ci-bàs)
Tableau 1: Formulation et optimisation des performances – Caractéristiques analysées sur enrobé
Ces essais seront le cas échéant complétés par des essais de caractérisation/performantiels sur les éléments du mélange. Ces éléments, les performances et essais du Tableau 1 ainsi que le couplage thermomécanique seront à finaliser en accord avec la commission de suivi.
3) Comportement sous sollicitations contrôlées
Le comportement sous sollicitations contrôlées sera analysé dans une halle d’essais en vraie grandeur. Les Figures ci-dessous représentent schématiquement les différentes superstructures qui seront testées
(FIGURE 2+3 voir lien ci-bàs)
Deux différentes planches d’essais seront construites, les couches de base (AC EME) et de fondation (sable et grave concassée) étant par ailleurs identiques :
· Champ 1 : Couche de roulement AC MR 8 (x%), « x » représentant la teneur en vides.
· Champ 2 : Couche de roulement AC MR 8 (y%), « y » représentant la teneur en vides.
Le choix des types d’enrobés macro-rugueux sera effectué de manière à tester différentes teneurs en vides et obtenir des informations complémentaires aux essais en laboratoire. Des teneurs en vides de 8% et 12% sont envisagées pour les essais en conditions contrôlées, mais seront fixées en accord avec la commission de suivi du projet. Pour la couche de base, il est choisi un enrobé à module élevé avec 20% en masse de matériaux recyclés (RAP). Nous pouvons encore relever que l’épaisseur des différentes couches sera déterminée sur la base d’un dimensionnement selon les méthodes suisse et française.
Les éléments suivants seront mesurés lors des essais :
· Température de l’air (1 sonde).
· Température de l’enrobé aux interfaces couche de surface - couche de base et couche de base - grave (1 sonde par champ et par interface).
· Déformations au bas des couches bitumineuses : 5 jauges par trace (3 longitudinales, 2 transversales).
· Déformations au bas de la couche de roulement : 4 jauges par trace (2 longitudinales, 2 transversales).
La mesure des déformations sera effectuée au moyen de jauges Kyowa (KM-120-120-H2-11W1) spécialement montées au Lavoc et appliquant le principe du pont de Wheatstone. Cette mesure des déformations s’effectue dans la zone centrale (1.5 m) de la chaussée où la vitesse du simulateur de trafic est constante. Ces différentes mesures permettront de calculer par la suite les coefficients d’équivalence de la chaussée. Au total 36 jauges de déformations seront utilisées.
La mesure de la température sera effectuée au moyen de sondes Pt100. Cette mesure permet de vérifier et si nécessaire ajuster le groupe de climatisation. Elle fournit également des données pour la modélisation ultérieure. Au total 5 sondes de températures seront utilisées.
Nous pouvons encore relever que les paramètres suivants seront définis et maintenus constants pour toute la durée de l’expérience :
· Type de pneumatique : Super-single
· Pression de pneumatique : 0.9 MPa
· Vitesse constante du simulateur de trafic (~10 km/h)
Le programme des essais en vraie grandeur est identique pour les deux champs étudiés. Il se compose des quatre étapes suivantes :
A) Modèle de réponse : Essais à Tsurface = + 15°C
· Charge = 8 tonnes sans trancanage,
· Charge = 10 tonnes sans trancanage,
· Charge = 13 tonnes sans trancanage,
· Charge = 11.5 tonnes sans/avec trancanage ± 0.4 m.
B) Modèle de réponse : Essais à Tsurface = – 15°C
· Charge = 8 tonnes sans trancanage,
· Charge = 10 tonnes sans trancanage,
· Charge = 13 tonnes sans trancanage,
· Charge = 11.5 tonnes sans/avec trancanage ± 0.4 m.
C) Modèle de performance : Essais avec cycles de température
· cycles journaliers avec Tsurface entre – 10°C … + 10°C,
· charge constante à 11.5 tonnes,
· 60'000 cycles du simulateur de trafic i.e. 120'000 sollicitations (~1000 cycles par heure).
D) Modèle de performance : Essais à Tsurface = + 45°C
· charge constante à 11.5 tonnes,
· 20'000 cycles du simulateur de trafic i.e. 40'000 sollicitations (~1000 cycles par heure).
(TABLEAU 2 PLANNING D'ESSAI voir lien ci-bàs)
Tableau 2: Planning d'essai pour un champ
En plus de ces essais, des mesures FWD et la calculation inverse des modules seront effectuées avant le démarrage des essais ainsi qu’à la fin des essais.
Comportement structurel – détermination de coefficients d'équivalence
L’état structurel décrit le comportement mécanique de la chaussée, qu’il soit actuel ou qu’il conditionne le comportement futur de celle-ci. Les performances structurelles sont par exemple l’orniérage, la fissuration thermique ou la fatigue mécanique [2].
Afin d’évaluer le comportement structurel de la chaussée, des mesures de déformation au bas des couches bitumineuses seront effectuées. L’éventuelle apparition de fissures pourra être mise en évidence par la diffusion d’un mélange de saumure sur la chaussée. Des essais au FWD permettront de calculer les différents modules d’élasticité en vue de la modélisation. Des indications concernant le comportement à basses températures ainsi que l’analyse en laboratoire de l’incidence de la teneur en vides fourniront davantage d’informations.
Les coefficients de portance de la couche AC MR seront également déterminés sur la base de ces essais en conditions contrôlées. Pour cela, une méthodologie comparable à celle suivie par Perret & al. [4] sera suivie en appliquant les étapes générales suivantes :
1. Modélisation de différentes structures pour les valeurs limites supérieures des différentes classes de trafic définies par les normes (T1 à T6, représentées par le nombre d’essieux équivalents N) ; avec deux types d’enrobé macro-rugueux et un enrobé de référence. Dans ces calculs, l’épaisseur de la couche de roulement (h) est calculée, les autres couches ayant une épaisseur fixe. Le calcul N=f(h) s’effectue selon la méthode française.
2. Etablissement de régressions h=f(N) – fonction logarithmique – afin d’obtenir une durée de vie théorique équivalente.
3. Calcul de N pour les différentes classes de trafic et détermination des épaisseurs de couche correspondantes.
4. Calcul des rapports des épaisseurs pour établissement des coefficients d’équivalence.
Comportement fonctionnel
L’état fonctionnel comprend les caractéristiques de la surface de roulement qui ont une influence sur la sécurité et le confort de l’usager. Les performances fonctionnelles sont par exemple l’adhérence ainsi que l’uni longitudinal et transversal [2].
Le comportement fonctionnel sera évalué à différents moments sur les sections suivantes :
· En conditions contrôlées sur les planches construites à la halle fosse.
· In-situ, sur une sélection de 5 planches sous trafic depuis au moins trois ans.
Pour l’analyse du comportement fonctionnel il est proposé d’analyser les propriétés suivantes :
· Adhérence
· Drainabilité [5]
· Uni longitudinal – in situ uniquement
· Uni transversal – in situ uniquement